Nucléaire: il ne faut pas croire – il faut savoir !

Premiers articles (d’un rédacteur de Le Temps, LT), suivis d’une chronologie de lettres de lecteurs.

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Initiatives malvenues

Bernard Wüthrich, LT le 9 mars 2015

Une taxe d’incitation, qui incite à ne rien faire

Bernard Wüthrich, LT le 10 mars 2015

Lettre de lecteur

Sortie du nucléaire: on devra revenir en arrière

À deux reprises (Le Temps des 9 et 10 mars, Bernard Wuthrich écrit «que l’on devra forcément tourner le dos au nucléaire un jour» et qu’«on ne reviendra pas en arrière sur ce point». Cette certitude n’est de loin pas encore partagée par le Peuple suisse qui aura, en tant que souverain, à se prononcer lorsque les modifications légales prévues par la Stratégie énergétique 2050 devront lui être soumises. Car cette stratégie fait fausse route: au lieu de viser d’abord une réduction de la consommation des agents fossiles (à réserver à un usage en chimie de synthèse plus judicieux que leur combustion), elle se focalise sur un difficile et très coûteux remplacement (non nucléaire) de la production de nos cinq réacteurs. Dès 2020 on découvrira ce qui compensera les 3 TWh (milliards de kWh) manquants de Mühleberg!

La Suède avait décidé de sortir du nucléaire d’ici 2010 et n’en a rien fait, ayant choisi en 2009 de remplacer un à un chaque réacteur obsolète par un nouveau plus moderne. L’Angleterre va construire trois réacteurs avec le concours d’EDF, deux jumeaux sur le site de Hinkley, sur la côte atlantique du Somerset, et un à Sizewell, dans le Suffolk, qui contribueront à faire passer de 18 à 30% la part nucléaire dans l’électricité produite par le pays. Ce seront des EPR français d’une puissance de 1,65 GW (gigawatt) chacun et produisant 13 TWh/an chacun. Le coût prévu de 16 milliards de livres (24 milliards de francs) sera financé par des entreprises d’État chinoises qui, avec EDF, percevront une redevance sur la production. De son côté, l’Allemagne s’entête à remplacer sa production de base, assurée par le nucléaire, par des centrales à charbon (du lignite peu écologique). Ce sont 54% de son électricité qui sont produits par des agents fossiles. La Suisse, avec son bouquet de 60% de renouvelables et 40% de nucléaire, n’a pas à rougir de son bilan écologique; quel exemple voudra-t-elle suivre?

Christophe de Reyff, Pensier (FR), LT le 16 mars 2015

Cette lettre de lecteur a aussi été publié sur la page: http://clubenergie2051.ch/2015/03/20/sortie-du-nucleaire-on-devra-revenir-en-arriere/

Lettre de lecteur

Oui, le nucléaire, c’est fini!

Jean-Louis Sottas, Meyriez (FR), LT le 30 mars 2015

Lettre de lecteur

Envoyé à LT le 23.4.2015; en italique les passages supprimés par la Rédaction de LT (!)

Fukushima – il y a quatre ans déjà.

Chacun a le bon droit d’être nostalgique de l’énergie nucléaire, cette énergie si dangereuse du siècle passé.

Mais de réduire les conséquences de la catastrophe de Fukushima à l’affirmation qu’elle “n’a fait périr personne pour des raisons d’irradiation”, comme le fait M. de Reyff dans sa lettre de lecteur du 21 avril 2015, c’est au moins très cynique.

Et c’est une gifle impardonnable pour tous ces Japonais qui souffrent encore de cette catastrophe d’il y a quatre ans, dont voilà quelques unes des conséquences:

  • Des dizaines de milliers de familles évacuées ne pourront plus jamais revenir dans leurs maisons situées dans la zone irradiée à jamais.
  • Et d’autres dizaines de milliers d’habitants continuent à vivre dans des zones où la radioactivité est bien plus élevée que la norme internationale. Des enfants dans ces zones qui n’ont pas été évacuées n’ont pas le droit de jouer à l’air libre pendant plus qu’un quart d’heure par jour.
  • Des nouveaux cas de cancers de la thyroïde sont découverts chez des enfants de Fukushima.
  • Il reste difficile pour la population de se procurer de la nourriture non contaminée.
  • Beaucoup de paysans ont perdu leur ferme, située dans la zone irradiée à jamais, il y en a même eu qui se sont suicidé par désespoir.
  • Les paysans restants ont des problèmes pour écouler leurs produits, et les pêcheurs n’ont plus le droit de poursuivre leur activité dans la mer contaminée.
  • Tous les jours une quantité énorme d’eau contaminée s’écoule encore dans la mer. De nouvelles fuites ont été découvertes fin février 2015.
  • Et les réacteurs détruits ou endommagés continuent de menacer la santé de la population, parce qu’ils sont encore loin d’être sécurisés.

Et tous ces faits dramatiques M. de Reyff préfère les taire afin de pouvoir promouvoir l’énergie nucléaire?

N’oublions pas Fukushima, un accident nucléaire grave peut aussi arriver chez nous!

Heinz Gasser, Sentier de Clies 4, 1806 St.-Légier, LT le 5 mai 2015

Lettre de lecteur

Fukushima: de l’imaginaire aux faits

Il y a des mots, tel l’adverbe «jamais», qu’il ne faudrait pas employer à la légère et surtout pas lorsqu’on ne semble pas informé des faits. M. Heinz Gasser me prend à partie (LT du 5 mai) pour avoir cité l’une des conclusions concernant les conséquences sanitaires de l’accident nucléaire de Fukushima, tirée du rapport annuel «Niveaux et effets de l’exposition aux radiations liée à l’accident nucléaire après le séisme et le tsunami de 2011 au Japon», présenté à l’Assemble générale des Nations Unies par l’UNSCEAR, le Comité scientifique de l’ONU sur les conséquences des émissions radioactives, dont l’autorité de tutelle est le PNUE, le Programmes des Nations Unies pour l’environnement. Les rapports de l’UNSCEAR sont des références mondiales et sont pris en compte par l’ICRP, la Commission internationale de protection radiologique. Le président du Comité scientifique, Wolfgang Weiss, a déclaré en conclusion: «Aucune augmentation discernable des taux de cancers ou d’autres maladies n’est attendue».

Écrire, selon M. Gasser, que «des dizaines de milliers de familles ne pourront plus jamais revenir dans leurs maisons situées dans la zone irradiée à jamais» relève de la désinformation tendancieuse, voire du mensonge, car, effectivement, après décontamination et examen rigoureux, ces zones sont progressivement déclassées et les familles retournent chez elles au fil des mois. De plus, aucune zone irradiée ne l’est «à jamais», du fait que, outre les travaux de décontamination des surfaces, toute radioactivité artificielle baisse inéluctablement et constamment pour atteindre le niveau naturel.

Prendre connaissance des faits réels et non pas suivre son imagination ou divers mots d’ordre d’intoxication, et donc faire confiance aux analyses réalisées par les experts reconnus internationalement et mandatés par les plus hautes autorités, c’est la façon correcte de s’informer et d’éviter des égarements émotionnels.

Christophe de Reyff, Pensier (FR), LT le 26 mai 2015

Lettre de lecteur, publiée sous le titre

«La stratégie énergétique 2050 se heurte aux faits», choisi par LT au lieu du titre original (!):

Nucléaire: des considérations financières malvenues

Comme M. Jean-Louis Sottas m’a interpellé personnellement (LT du 30 mars), je me permets de lui rappeler ici, au-delà des questions de coûts, l’importance prioritaire des faits environnementaux qu’il se garde de mentionner. La «Stratégie énergétique 2050» a été suscitée suite à la catastrophe de Fukushima – qui pourtant, dans son volet nucléaire, n’a fait périr personne pour des raisons d’irradiation, il importe de le redire – et pourtant elle est orientée prioritairement vers la suppression de l’énergie nucléaire en Suisse du fait aussi que l’Allemagne a choisi cette voie. Regardons-y de plus près!

L’Allemagne produit son électricité de façon très peu écologique: avec 161 TWh (milliards de kWh) produits en 2013 par des centrales à lignite c’est le deuxième chiffre le plus élevé depuis 1990 (171 TWh) où sa part était de 31%; elle est encore de plus de 25%. Il faut encore y ajouter les parts dues à l’anthracite, au gaz et au pétrole: à fin 2013, l’ensemble de ces agents fossiles atteignait plus de 56%. L’accroissement sur 8 ans des ressources renouvelables entre 2006 (la dernière année de production nucléaire majoritaire) et fin 2013 est de 80 TWh (de 72 à 152 TWh), mais cela a principalement compensé la diminution du nucléaire de 70 TWh (de 167 à 97 TWh) et non pas celle des agents fossiles qui n’a été que de 18 TWh (de 375 à 357 TWh).

Même si un réacteur EPR allait coûter 10 milliards, sa production électrique annuelle d’un courant (de base!) de 13 TWh dépasse l’accroissement annuel moyen des 10 TWh renouvelables (et aléatoires!) en Allemagne. La considération financière qu’évoque M. Sottas est bien secondaire à côté des impacts environnementaux de 11 tonnes d’équivalent CO2 par an et par tête en Allemagne, encore que les producteurs de kWh renouvelables soient rétribués à hauteur énorme de 20 milliards par an pour soutenir leur production. Encore une fois, veut-on suivre cet exemple?

Christophe de Reyff, Pensier (FR), LT le 21 avril 2015

Commentaire:

La sortie du nucléaire est une erreur: la médecine et la biologie montrent qu’il n’y en a aucune nécessité, même en tenant compte d’un accident comme Fukushima; la physique établit qu’il n’y a pas  réellement la possibilité de le remplacer avec des énergies renouvelables; pire, en matière économique et en matière stratégique, pour la Suisse c’est une pure sottise: notre sécurité d’approvisionnement en est menacée, cela se verra dès 2020.

M. Wüthrich croit qu’on pourra tourner le dos au nucléaire et ne pas revenir en arrière; il croit aussi que la stratégie énergétique 2050 de la Confédération n’est pas remise en cause par la votation du 8 mars 2015 … on attend encore sa démonstration et ses chiffres.

M. Sottas croit que le nucléaire est trop cher, alors que ses prestations ne sont pas remplaçables (sitôt qu’on fait de la physique) …

M. Gasser propage les craintes qu’a soulevées à tort l’accident de Fukushima; il croit que cet accident a fait des milliers de victimes, alors qu’on peut se poser des questions sur les justifications de la gestion de cette catastrophe industrielle par les autorités … et qu’il n’y a pas de malades ou de morts par irradiation; contrairement au désastre du tsunami le même jour …

… En résumé, ces auteurs sont des victimes de la secte anti-nucléaire !

Il y a heureusement M. De Reyff, qui s’appuie sur les faits et sur les chiffres, sur les sciences et sur les données d’experts – et pas sur des croyances ou sur des opinions. Pour cela, je l’en remercie vivement! 

Documentation (physique): 

Remplacer Mühleberg nucléaire ? Exclu !

Documentation (médecine et biologie):

Thèmes dans le blog – pour débuter

André Bovay-Rohr, Colombier, le 16 juin 2015,

rév.17.6.2015, rév. 20.6.2015

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