Pénuries de 70% !

Combien nous faudra-t-il de production d’électricité, pour sortir indemnes du futur serrage de ceinture? En effet, pour sortir du CO2, il faudra cesser de brûler du pétrole, du gaz (ou des briquettes de charbon) … et selon les physiciens se rabattre sur l’électricité, en Suisse pour le moment 60 TWH (sur une énergie totale consommée de 253 TWH, le record de consommation de tous les temps; cela présage plutôt mal de la suite! ).
 La production électrique va donc devoir exploser, pour être capable de répondre aux besoins, tôt ou tard privés de leurs sources d’énergie actuelles. A Berne, on a fait comme si ce problème n’existait pas … comme si l’électricité allait continuer son petit bonhomme de chemin.

Pourtant à cause du CO2 l’océan mondial monte lentement, et la fonte de toutes les glaces l’amènera à monter encore ; il ne s’arrêtera pas de monter mm par mm … jusqu’à 100 mètres ! Pour l’instant, le réchauffement a eu globalement pour effet de faire régresser les banquises de l’océan glacial arctique, à température peu changée, mais le phénomène s’accélère sous l’effet du CO2 déjà dans l’atmosphère: le monstre se réveille – n’en jetez plus !

§ Nos dépenses 2010 en énergie. Nous avons les statistiques fédérales pour bien cadrer le sujet:

Répartition de consommation finale selon

Répartition de consommation finale selon

Pour faire cette statistique, l’OFEN a additionné TWH thermiques et électriques: étonnante physique !

Je prends pour l’analyse qui suit, comme unité de production d’énergie électrique une Usine-400, caractéristiques 3 TWH d’énergie électrique, délivrée en 11 mois sur 12 dont toute la saison froide, 24H/24 et avec la puissance de 400 MW (cela ressemble à la plus petite de nos usines électro-nucléaires). Une telle Usine-400 produit actuellement comme déchet 6 TWH de chaleur résiduelle à moins de 100°C (qu’on jette à la rivière ou dans une tour de refroidissement, parce qu’il y en a tellement qu’on ne sait pas qu’en faire, à la campagne ou en été).
Pourquoi la source d’énergie primaire choisie est-elle thermique et gaspille-t-on tellement de chaleur ? Parce cette sorte d’usine produit fidèlement la plus noble des énergies, l’électricité … question fidélité, on ne peut donc pas prétendre que 800 éoliennes ou 800 installations photovoltaïques de 2 MW y seraient équivalentes, hélas !

§ Electricité: avec 23.6% de l’énergie globale consommée, la Suisse a disposé donc en 2010 de 60 TWH électriques; la production hydraulique (36 TWH électriques) continuerait inchangée, ce qui avec l’évolution climatique n’est cependant pas garanti; un équivalent de 12 Usines-400. Mais il faut vraisemblablement à terme remplacer non seulement les 3’200 MW d’ancien nucléaire suisse (production estimée à 24 TWH électriques) mais aussi la puissance du courant nucléaire venu actuellement de France (et qui ne nous serait plus livré en échange de notre courant électrique de pointe, d’origine hydraulique); pour le seul remplacement de ces deux sources nucléaires,  indispensables pour la stabilité du réseau, il nous faudra au moins 16 Usines-400 toute l’année (le double de la puissance du nucléaire suisse actuel); c’est le prix de l’indépendance.

§ Transports: ils comprennent toutes les dépenses d’énergie pour voitures, camions, agriculture, machines de chantier et autres. Ici il s’agit de l’énergie thermique primaire contenue dans les carburants (32.3% du grand total des dépenses, 82 TWH thermiques); le rendement des moteurs est généralement d’environ 25%: la fourniture d’électricité équivalente devrait donc avoisiner les 21 TWH électriques; mais comme il faut passer par des moyens d’accumulation (batteries ou air comprimé), il va y avoir de solides pertes et donc on doit décompter pour les transports au moins 30 TWH électriques en énergie, soit 10 Usines-400 toute l’année, plus celles pour absorber les pointes de consommation.

§ Chauffage: il va falloir remplacer par de l’électricité (ou par de la chaleur amenée par des conduites)  l’énergie thermique contenue dans les combustibles pétroliers (21.9%, soit 56 TWH thermiques) et dans le gaz naturel (12.7%, soit 32 TWH thermiques), tant que les maisons ne seront pas reconstruites pour ne plus consommer de chauffage; total 88 TWH thermiques. Avec des pompes à chaleur, on devrait pouvoir se contenter de 29 TWH électriques pour obtenir ces 88 TWH thermiques; mais j’ai des doutes sur le rendement des pompes à chaleur en hiver et on ne pourra pas se contenter d’une puissance moyenne pour ce groupe d’usines (les dépenses se font principalement à la saison froide, avec des pointes de froid intense d’une à deux semaines); au lieu de 10 Usines-400, on devra donc en construire au moins 25; ce nombre pourra être sérieusement réduit, si l’on utilise l’abondante chaleur résiduelle des Usines-400; mais on devra les construire dans ou très près des villes, amenée aux clients par des réseaux de chaleur à distance …

§ Reste: y sont comprises les énergies renouvelables; actuellement 9.5% d’énergie (24 TWH thermiques ou électriques joyeusement mélangés) produite localement, dont ne fait pas partie l’électricité hydraulique; pourrait être produite par l’équivalent de 8 Usines-400. Il n’y a évidemment pas besoin de la remplacer; on ne peut pas en attendre de miracle, car elle est très chère, mais on observe une progression continuelle, pénible, de quelques fractions de % chaque année (éoliennes et panneaux solaires).

Conclusion
On voit venir le besoin d’au moins 50 Usines-400 (si possible de 5ème génération nucléaire) supplémentaires,
une puissance de 20’000 MW électriques (2’500 W électriques/personne). Pour atteindre ce montant minimum, il faudra multiplier par au moins 6 la puissance du parc d’usines électro-nucléaires actuel ! En effet, pour le moment, on ne saurait, ni où prendre pareille quantité, ni comment faire des économies, un total de 90% (!); sans nucléaire, ce sera  l’effondrement … ou une dépendance persistante et même accrue aux importations: c’est le refus collectif de la réalité future, par peur (infondée) du nucléaire !

On se rend compte que tous ceux qui prétendent pouvoir soi-disant “sortir du nucléaire” ont oublié qu’il faut d’abord sortir du CO2 …
Que des écolos peu physiciens aient de la peine à faire ces calculs et à en accepter les conclusions se conçoit; mais venant du Parlement, du Conseil fédéral, du Conseil des EPF et de l’OFEN, c’est un mauvais cauchemar, un scandale !

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