Eteindre un incendie, c’est faisable …

Présentation de l’auteur.

J’ai fait partie du corps des sapeurs-pompiers volontaires de Colombier (VD) d’avril 1975 à mars 1991. L’invention est une maladie à virus, que j’ai contractée à la naissance en 1942, sérieusement aggravée par des études de prof. de sciences (physique et chimie) à l’Université de Lausanne; je ne suis pas devenu prof., mon métier a été informaticien système.

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§ Au feu !

De l’expérience courante des pompiers, le foyer principal d’un feu dans une grange ou dans un appartement devient totalement masqué par les fumées après environ 5 minutes. La toxicité des fumées, la chaleur, les explosions et la chute de matériaux rendent dès ce moment-là les lieux très dangereux: les consignes pour les premiers arrivés sur les lieux sont de sauver les gens et le bétail, puis de protéger le voisinage, de tenir, en prenant le minimum de risques.  

Il est généralement hors de question techniquement d’éteindre rapidement un gros feu; le plus souvent, tout brûle; le danger qu’il y aurait à éteindre et l’ampleur des moyens à mettre en oeuvre sont considérés comme excessifs, alors que l’essentiel des dégâts (par la chaleur, par la fumée et par la suie, par l’eau, par la poudre, etc) sont déjà faits; il est de fait, que les outils pour éteindre vraiment sont politiquement mal vus, ignorés, pestiférés et – là où ils existent – rarement mis en oeuvre … 

 

§ Rôle de la longue-lance légère.

Au-dessus d’un feu important, l’arrivée de gouttes d’eau empire la situation: carbone incandescent + eau génèrent du gaz de ville   C + H2O => CO + H2   très calorifique, flammes qui vont propager le feu vers le haut et de côté; d’où l’expérience qu’il est généralement impossible d’arrêter un gros feu bien en route, malgré un arrosage intense.

De mon expérience de pompier, j’ai tiré en 1987 l’idée d’un dispositif de refroidissement, de lavage de fumées et d’extinction de gros feux avec peu d’eau. Sachant que la combustion s’effectue avec une circulation des gaz allant de bas en haut, il est particulièrement efficace de pouvoir glisser une source intense de gouttes d’eau sous le feu ou très près de la base du feu, pour étouffer, surtout par le froid mais aussi sous l’eau, la génération de gaz combustibles, si l’on cherche à éteindre vraiment. J’ai mis au point un prototype simple en été 1988, que j’ai appelé “longue-lance légère”. Elle permet d’agir à distance prudente, manipulable facilement par une seule personne.

1999 BA avec longuelance

La longue-lance permet de continuer à intervenir (éventuellement en cassant de l’extérieur une vitre et en passant donc par une fenêtre) quand le sinistre est par son importance ou son danger hors de portée des extincteurs individuels : l’intervention efficace du concierge ou des occupants de la maison, dans les minutes dès le début d’un feu et avant l’arrivée des pompiers, peut faire la différence entre un sérieux incident maîtrisé ou un incendie détruisant tout le bâtiment.

Pour les pompiers, la longue-lance représente la possibilité d’envoyer de l’eau à la base du feu dans les pires endroits d’un incendie. Par rapport à d’autres techniques, les quantités d’eau utilisée permettent de limiter au strict nécessaire les dégâts d’eau.

 

§ Longue-lance, historique de l’usage du prototype.

§ Après des tests dans mon jardin à la pression de 4 bars, le prototype a été essayé au local des pompiers en 1988 à 6 bars, sans aucun problème. Il s’est révélé particulièrement important que le tuyau d’amenée d’eau soit très léger, ce que ne sont pas les très grosses “courses” des pompiers (nom donné aux tuyaux souples de 80 ou 100 mm de diamètre, amenant de l’eau aux lances sous environ 10 bars).

§ Puis j’ai eu l’occasion le 25.5.1991 d’aller au CRIO d’Aubonne (Centre d’instruction de la Région Ouest ) éteindre en moins d’une minute un feu ronflant d’une dizaine de vieilles palettes CFF, allumé dans la maison de test (rez-de-chaussée). Un succès total …

 1999 BA au CRIO

 Photo Daniel Bovay            Intervention seul sur un gros feu à travers une fenêtre

Les palettes qu’on voit ne jouent pas de rôle dans le test, l’homme derrière elles non plus.

 

§ Dans les années suivantes, lors d’essais d’arrosage un 1er août d’arbres supposés être menacés par le feu, la tige en fer a cédé à l’effort de levage à 2 m de l’extrémité inférieure (effet néfaste du perçage tous les 5 cm: un prototype futur devrait utiliser à cet endroit des tubes plus résistants). L’intérêt de la longue-lance serait aussi de pouvoir attaquer un feu de broussailles important ou un feu de forêt débutant, en créant un couloir mouillé. 

 

§ Dans ce beau Pays de Vaud et dans ma Commune, il y a eu absence totale d’intérêt du corps des pompiers de l’époque et de l’Etablissement Cantonal d’Assurances (ECA), informé le 1.6.1999; j’ai laissé tomber … 

§ Conclusion provisoire

Jusqu’à ce jour, j’ai gardé le prototype de 1988 pour la défense incendie de ma maison. La présente information devrait être utile, à tous ceux que l’idée de laisser brûler leurs biens sans pouvoir rien faire révulse ! Car fabriquer une longue-lance légère est à la portée de tout bon bricoleur: à bon entendeur !

 

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PS technique

§ Il va de soi que dans ma maison plusieurs autres mesures contre l’incendie ont été prises, telles que l’installation d’une prise d’eau de gros diamètre sur l’arrivée d’eau, juste après le compteur d’eau (pression nominale 6 bars), ainsi que des extincteurs à mousse et à poudre (boîtes de bicarbonate de soude à jeter à la main) placés dans tous les endroits à risque.

 

§ Longue-lance, cahier des charges de 1987.

§ Une longue tige rigide sert à diriger une tête d’arrosage dans ou sous un foyer d’incendie depuis l’extérieur, sans risquer la peau et les os d’un sapeur-pompier. Elle est montable rapidement par modules.

 § Un arrosage de refroidissement tout au long de l’amenée d’eau doit être assuré, pour qu’elle et la tige puissent résister à la chaleur.

§ Un arrosage en jets de gouttelettes de bas en haut, tout au long de l’amenée d’eau, produit un effet de lavage de fumées en plus de l’extinction.

Cet effet de “passage rafraîchi et lavé en pluie” est utile au cours d’un sauvetage ; il est nécessaire pour voir où diriger la tête de la longue-lance.

§ Longue-lance. Description du prototype de 1988. 

 § Comme tête de lance particulièrement résistante et dépourvue de pièces mobiles, j’ai choisi un “jet papillon” d’arrosage de jardin en dural. La pièce d’origine a subi trois modifications simples :

  1. – Découpe pour réduire la taille du socle.
  2. – Perçage du socle pour fixation à la tige (par vis et écrou M6).
  3. – Perçage d’un trou de Ø 2 mm à orifice conique, pour créer un jet frontal orientable.

1999 tete longuelance

§ La tige de 12 m de longueur était constituée en 1988 de 4 sections de tubes en fer emboîtés. Chaque section est constituée d’un tube de 1.20 m de long et de Ø 26 mm, qui s’emboîte dans un tube de 2 m de long et de Ø 30 mm, percé de trous de Ø 6 mm tous les 5 cm. La tige pesait donc un peu plus de 12 kg (note de 2014: lors de l’incident survenu pendant l’essai dans les arbres, elle a perdu 2 m: le prototype reste utilisable !).

Les tubes sont fixés entre eux par des chevilles en acier de Ø 8 mm, à montage/démontage rapide (qu’on trouve d’ordinaire par exemple pour le montage des roues de motoculteur).

§ L’amenée d’eau est un tuyau triple percé (d’arrosage de jardin), connecté directement à la tête. Ce tuyau percé de 15 m est volontairement plus long que la tige, se termine par un connecteur Geka.

Il est prolongé par un tuyau de jardin, de Ø 25 mm ou de Ø 36 mm à connecteurs Geka, de 20 m de longueur.

Le raccordement au réseau des pompiers peut se faire par un connecteur de 80 mm DIN 14321 relié par tuyau de 28 mm à un connecteur  Geka.

André Bovay-Rohr, Colombier (VD), Suisse, le 3.2.2014

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